Règles d’incitation pour une meilleure utilisation des sillons ferroviaires

Par Clémentine Maudoux, direction des affaires juridiques de l’Araf

A l’occasion de quatre règlements de différend présentés en avril 2013 par des entreprises de fret (ECR, VFLI, Europorte, T3M) contre RFF, l’ARAF a été sollicitée pour améliorer et compléter les mécanismes incitatifs applicables si le gestionnaire d’infrastructure modifie ou supprime tardivement des sillons sur le réseau ferré national. L’Autorité a adopté ses décisions le 15 juillet 2014

A ce jour, RFF connait certaines difficultés pour attribuer des sillons satisfaisant les besoins de ses clients, dans un calendrier acceptable. Ce qui ne permet pas aux entreprises de fret de répondre précisément aux besoins des chargeurs et génère des comportements peu vertueux : surréservation de sillons par certaines entreprises ou libération tardive des capacités non utilisées.

Après avoir statué dès octobre 2013 sur les premières améliorations demandées à RFF, l’Autorité a poursuivi ses travaux pour définir des mécanismes incitatifs en vue d’une meilleure utilisation du réseau. Un groupe de concertation réunissant les entreprises ferroviaires, les autorités organisatrices de transport, leurs associations, RFF et le ministère des transports a été mis en place en février 2014. Très vite, ce groupe a souhaité élargir le débat aux problèmes de réservations des capacités pour la réalisation des travaux et aux réponses temporaires de RFF (les « sillons à l’étude ») à l’origine des principales difficultés évoquées.

A l’issue d’une consultation publique sur ces trois sujets, l’Autorité a adopté le 15 juillet 2014 quatre décisions traitant les demandes faites en règlement de différend, et deux décisions réglementaires transmises pour homologation au ministre chargé des transports.

  • Décision relative aux évolutions tardives de sillons attribués

L’Autorité a adopté deux mécanismes incitatifs différents : pour RFF d’une part, pour ses clients d’autre part. L’objectif est d’encourager les acteurs à adopter des comportements permettant un meilleur usage du réseau.

Dans les deux cas, un système de pénalités progressives vise à inciter RFF et ses clients à anticiper autant que possible les modifications de sillons attribués.

  1. S’il doit supprimer un sillon attribué, RFF sera incité à ne pas le faire mais à proposer un sillon alternatif compatible avec les besoins des entreprises.
  2. Si elles ne veulent plus utiliser une capacité, les entreprises ferroviaires seront incitées à les restituer plus tôt afin que cette capacité puisse bénéficier à d’autres opérateurs.

Afin de ne pas affecter la compétitivité du fret ferroviaire, les pénalités versées par les entreprises seront redistribuées aux opérateurs de ce secteur, au prorata du nombre de kilomètres effectivement circulés. Les pénalités versées au titre des transports de voyageurs sont affectées à RFF.

Des cas d’exonération sont également prévus afin d’éviter de sanctionner des comportements peu impactant pour le système ferroviaire. Un retour d’expérience sera établi dans un an, après un semestre de fonctionnement.

Ces décisions font l’objet dun recours par RFF devant la cour d’appel de Paris : le gestionnaire d’infrastructure conteste la compétence de l’Autorité pour adopter ces décisions. Les mécanismes incitatifs ne sont pas attaqués sur le fond.

  • Décision relative aux demandes effectuées lors de la concertation

L’Autorité a adressé au ministre pour homologation une première décision portant sur les règles de réservation par RFF de capacités pour la réalisation des travaux sur le réseau.

Il s’agit par exemple, de préciser dans la réglementation certains principes comme le juste dimensionnement des capacités réservées ou l’obligation de confirmer au plus tard six semaines avant la date des travaux les capacités nécessaires à leur réalisation. L’Autorité a également demandé à RFF de suivre l’utilisation des capacités dédiées aux travaux.

Une seconde décision a été transmise au ministre : elle porte sur la qualité des sillons attribués par RFF. Elle encadre notamment son recours aux « sillons précaires » ou « sillons à l’étude ».
Elle impose au gestionnaire d’infrastructure une date limite de réponse définitive et l’oblige à proposer aux demandeurs dont le taux de sillons-jours fermes est inférieur à 90% un accord incitatif prévoyant les moyens d’un suivi spécifique et des conditions d’indemnisation.

La réponse du ministre concernant l’homologation de ces deux décisions est attendue pour fin septembre 2014, son refus devant être motivé.